Hôpital Général de Référence de Bena Tshiadi

Hôpital Général de Référence de Bena Tshiadi : l’ombre d’un « mouroir » à ciel ouvert


Hôpital Général de Référence de Bena Tshiadi : l’ombre d’un « mouroir » à ciel ouvert C’est un constat glaçant. À l’Hôpital Général de Référence (HGR) de Bena Tshiadi, dans le territoire de Dimbelenge (Kasaï Central), tout manque : médecins, équipements, lits, médicaments, banque de sang… et surtout un minimum de gestion. Officiellement centre de soins de référence, l’établissement n’en a plus que le nom. À plus de 240 km de Kananga, l’hôpital fonctionne dans des conditions d’un autre âge. Ses bâtiments délabrés, vestiges de l’époque coloniale, ressemblent davantage à des cases de fortune. Les rares constructions récentes ont été montées en briques de terre crue. Le plus aberrant : il n’y a plus de pharmacie. Transformé en salle pédiatrique, le local ne joue plus son rôle. Les soignants se contentent de prescrire, et les familles doivent se débrouiller auprès de petites officines locales, elles-mêmes rarement bien approvisionnées. « Notre hôpital est devenu un mouroir. Nous n’avons aucun financement, aucun produit pharmaceutique, aucune aide. Même nos représentants politiques restent silencieux », déplore l’infirmier stagiaire François Mbete. Des vies perdues en quelques heures La conséquence est dramatique. Le mercredi 3 septembre, deux décès ont été enregistrés en moins de quatre heures : une fillette de deux ans, morte faute de transfusion sanguine, et un sexagénaire, victime d’un AVC. « La majorité des donneurs potentiels exigent de l’argent, que les familles n’ont pas. Seuls les patients compatibles avec le groupe sanguin d’un agent de l’hôpital ont une chance de survivre », explique le Directeur de Nursing. Le témoignage des patients illustre la détresse. « Je suis interné depuis deux semaines pour une plaie infectée au tétanos. Nous devons acheter nous-mêmes nos médicaments et même les matelas. Si tu n’as pas d’argent, tu n’as aucune chance », raconte François Masanka. Crise de gestion et conflits internes Comme si la misère matérielle ne suffisait pas, l’hôpital est paralysé par une guerre de leadership. Le Médecin Chef de Zone, le Dr Sylvain Kasongo, est accusé de détournement de matériel par le chef de groupement, Nyime Mputu. Pris à partie par des jeunes armés de machettes, le médecin a fui. Le chef coutumier a tenté de nommer un nouveau directeur, mais la province a rejeté cette décision et suspendu l’intéressé. La zone est désormais dirigée par un infirmier superviseur du Programme Élargi de Vaccination (PEV), solution de fortune qui ne règle rien. Pourtant, la zone de Bena Tshiadi est le siège du secteur de Lukibu, berceau de personnalités politiques et humanitaires de premier plan. Parmi elles, le député national André Mbata Mangu et l’humanitaire Kenir Kenandi, fondateur de l’ONG CEILU. Mais leur engagement reste invisible sur place, au grand désarroi des habitants. Seul Kenandi a entrepris la construction d’un hôpital moderne dans son village natal, à une vingtaine de kilomètres. Un hôpital sans espoir Les inspections de la Division Provinciale de la Santé se succèdent, sans solution structurelle. Les soignants réclament une mutation générale du personnel pour ramener le calme et relancer la zone de santé. En attendant, pour les habitants du Kasaï Central, l’HGR de Bena Tshiadi n’est plus qu’un symbole tragique : l’endroit où l’on entre malade et d’où l’on ressort trop souvent sans vie. Crispin Phocas MAYIMBU

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