Kinshasa : à Pompage, le marché pirate impose une rude concurrence aux vendeurs réguliers À Pompage, dans la commune de Ngaliema, difficile de croire qu’un marché existe encore. À première vue, la chaussée elle-même semble devenue un vaste espace de négoce informel. Le marché pirate y bat son plein, éclipsant presque le petit marché réglementé situé à quelques pas de là. Les commerçants du marché Pompage dénoncent une concurrence déloyale qui fragilise leur activité. Ils pointent du doigt les vendeurs installés illégalement le long des artères principales, accusés d’accaparer une grande partie de leur clientèle. « Vendre au marché, ce n’est pas toujours facile, mais c’est mon métier et j’y mets tout mon courage. Le plus grand problème aujourd’hui, c’est la concurrence du marché pirate. Pour nous qui travaillons légalement, c’est un vrai combat », explique Maman Antho, vendeuse d’huile de palme, d’huile végétale et de fufu au marché Pompage depuis 2017. D’autres commerçantes, comme Maman Tété Kamwania, adoptent une position plus nuancée. Pour elle, si la concurrence est réelle, elle ne compromet pas totalement ses ventes. « J’ai une opinion partagée. D’un côté, chacun est libre d’acheter où il veut. Mais d’un autre, c’est injuste. Nous payons des taxes, nous respectons les règles, alors que ceux qui vendent dehors ne font aucun sacrifice. Pourtant, ce sont eux que les clients préfèrent, souvent parce qu’ils trouvent cela plus rapide », confie-t-elle, tout en insistant sur l’hygiène et la sécurité qu’offre le marché officiel. Les vendeurs pirates se défendent De leur côté, les vendeurs installés le long de la chaussée justifient leur présence par le manque d’espace et la faible fréquentation du marché. Certains affirment que leurs tentatives d’intégrer le marché ont échoué faute de places disponibles. D’autres reconnaissent que la visibilité en bordure de route attire davantage la clientèle. Les interventions ponctuelles de la police pour libérer la voie publique ne semblent pas les décourager. À peine les agents partis, les commerçants reviennent s’installer. Certains témoins évoquent d’ailleurs des complicités entre quelques agents de l’ordre et ces vendeurs, moyennant des « arrangements » financiers. Pendant ce temps, ces commerçants demeurent exposés à plusieurs risques, notamment les accidents de circulation. « Il y a pourtant beaucoup de tables vides dans le marché. Il y a de la place pour tout le monde. Mais beaucoup préfèrent rester dehors », regrette encore Maman Antho. Un espace en péril Selon plusieurs sources, le terrain abritant le marché Pompage serait une propriété privée. Une partie aurait déjà été vendue à des investisseurs indo-pakistanais, et des rumeurs font état de négociations pour céder le reste. Une situation qui fragilise davantage les vendeurs réguliers et entretient un climat d’incertitude. Face à cette situation, les vendeurs appellent les autorités locales à réagir. Ils plaident pour la construction d’un marché moderne et mieux structuré à Pompage, afin d’encadrer le commerce et de rétablir l’équité entre les vendeurs. « Nous avons déjà interpellé les responsables municipaux après la vente du marché, mais sans suite », confient certains d’entre eux. En attendant une solution durable, le marché pirate de Pompage continue de prospérer, au détriment d’un ordre urbain déjà précaire. Lilly Ndadika Difuana/Stagiaire
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