RDC : Manifestation contre l’exploitation illégale des minerais dans l’Est Plusieurs centaines de personnes ont manifesté mercredi 8 janvier 2025 à Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu, pour dénoncer l’exploitation minière illégale, en particulier par des entreprises chinoises. Ce rassemblement, organisé par des syndicats et des organisations pro-démocratie, a mis en lumière la pression croissante exercée par la société civile sur les autorités pour réguler un secteur souvent associé à la corruption, à l’insécurité et aux violations des droits humains. Sur les banderoles brandies par les manifestants, on pouvait lire des slogans tels que : « Les minerais du Sud-Kivu doivent servir au développement et au bien-être des communautés locales ». Cet événement intervient quelques jours après l’arrestation de trois ressortissants chinois en possession de lingots d’or et de fortes sommes d’argent liquide, a déclaré le gouverneur du Sud-Kivu, Jacques Purusi. Une exploitation minière illégale omniprésente Le Sud-Kivu, une province riche en ressources naturelles, abrite des centaines de sociétés minières, dont la majorité serait chinoise, selon les autorités locales. Nombre d’entre elles opèrent sans permis valide, échappant ainsi aux obligations fiscales et réglementaires. Les autorités provinciales avaient annoncé en juillet 2024 une vaste campagne visant à suspendre les activités des entreprises non conformes à la législation congolaise. Toutefois, cette initiative peine à produire des résultats concrets face à l’ampleur du problème. Les minerais extraits de cette région, tels que l’or, les diamants et les minéraux stratégiques (coltan, cobalt), alimentent l’industrie mondiale, notamment les secteurs de l’électronique et de la mobilité électrique. Cependant, l’exploitation de ces ressources est depuis des décennies une source majeure de conflits armés dans l’est de la RDC, aggravés par la résurgence fin 2021 du groupe rebelle M23. Kinshasa accuse régulièrement le Rwanda de soutenir ce mouvement rebelle pour s’approprier illégalement ces richesses. Les limites des initiatives pour freiner le marché noir En 2022, face à la contrebande massive de minerais vers le Rwanda, la RDC avait tenté de réorganiser le secteur aurifère en confiant le monopole d’exportation d’or au Sud-Kivu à l’entreprise Primera Gold. Cette mesure visait à assécher les circuits illicites. Cependant, selon l’ONG Bureau d’études scientifiques et techniques (BEST), Primera Gold a rapidement été confrontée à un manque de liquidités, ce qui a empêché toute transformation durable du secteur. En conséquence, le marché noir continue de prospérer, alimenté par des réseaux transfrontaliers bien établis. Une pression locale et internationale croissante Cette manifestation à Bukavu reflète l’exaspération croissante des populations locales face à un secteur minier perçu comme un instrument de spoliation plutôt que de développement. La société civile réclame des réformes profondes, notamment une meilleure transparence, une redistribution équitable des revenus miniers et une lutte accrue contre la corruption qui gangrène le secteur. Les autorités congolaises, tout en affichant leur volonté de réguler l’exploitation minière, doivent jongler avec des défis colossaux : la présence de groupes armés, les ingérences étrangères et l’impact environnemental de ces activités. À l’international, des appels se multiplient pour exiger davantage de traçabilité et d’éthique dans les chaînes d’approvisionnement, notamment de la part des entreprises multinationales qui utilisent ces minerais stratégiques. Un défi pour le développement local Le secteur minier représente un paradoxe pour la RDC : il constitue une richesse potentielle inestimable mais reste, à ce jour, une source majeure de conflits, d’inégalités et de pillage économique. Les manifestations, comme celle de Bukavu, rappellent que pour les populations locales, ces ressources doivent cesser d’être synonymes de malédiction et devenir un levier pour le développement durable. En attendant des solutions durables, l’exploitation minière illégale continue de miner (au sens propre et figuré) les espoirs de stabilité et de prospérité dans l’est de la RDC. Avec l’AFP
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